Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

2016-02-05T21:44:58+01:00

SAV

Publié par Estelle Lang Trommenschlager
SAV

Chers lecteurs, chères lectrices, vous connaissez sûrement cette rubrique humoristique, ces sketchs d’Omar et Fred, qui commencent par une sonnerie de téléphone bien stridente, et ce même préambule à chaque fois : service après-vente bonjour ! Ca vous fait rire ? Moi aussi. Parfois. Enfin avant surtout. Maintenant, un peu moins. Parce qu’en fin de compte, même si l’annonce est joviale, le SAV n’est pas toujours à la hauteur de nos attentes.

Qui n’a jamais eu à appeler pour un problème technique, de livraison, une simple question sur l’utilisation, un échange ou un remboursement ? On se trouve alors confronté à une plateforme téléphonique, sur lesquelles sont postées des personnes ayant à leur disposition un fichier des questions les plus récurrentes, leur permettant ainsi de répondre au plus juste à nos attentes. Seulement, ça reste des opérateurs, non des experts et parfois, on aimerait avoir quelqu’un qui maîtrise la question. Surtout si on a payé cher, préféré une marque au low cost, attendu si longtemps que ça soit le bon moment avant de se décider à sauter le pas… Certes, lorsque tout se passe bien, et qu’on a pas besoin d’appeler le SAV, on peut jusqu’à ignorer son efficacité. Mais quand ça déconne…ben ça déconne quoi !

Permettez-moi de faire le parallèle avec la prise en charge du cancer. Depuis le début, je chante les louanges de tous ces acteurs qui ont contribué à prendre soin de moi, comme des autres patients, atteints d’un cancer, et bénéficiant d’un traitement. Et je ne reviendrais pas en arrière, car c’est grâce à ces équipes de soin que tout se passe au mieux. Car autour de nous, autour du soin en lui-même, il y a tout un réseau, où nous sentons protégés, écoutés, compris. Au moindre souci une solution nous est proposée. En cas de difficulté, elle est étudiée, et si besoin est, il y a toujours la personne de la situation. Et puis un jour, les traitements sont terminés. On commence à parler de la suite, on sait que pour nous l’histoire ne s’arrête pas à la fin de la chimio ou de la radiothérapie. On s’imagine que la seule chose qui va changer désormais, c’est le fait de ne plus se rendre quotidiennement à nos rendez-vous.

Dernier rdv avec l’oncologue : on pourrait enlever le PAC même durant la radiothérapie, on ne va pas me le laisser puisque maintenant je n’en ai plus besoin. Mais comme c’est compliqué d’organiser tout en parallèle, j’accepte de le conserver encore jusqu’à début janvier. On doit se revoir après la fin des rayons.

Dernier rdv avec la radiothérapeute : tout va bien. J’ai super bien supporté, je n’ai pas vraiment d’œdème, mais ça reste à surveiller, sans quoi on pourra me proposer de la kiné de drainage.

Et je m’en vais. Trop heureuse de quitter cet endroit pour la dernière fois dans ce cadre-là.

J’entends certaines personne dire : ça y est, tout est fini, guérison, hop hop, on reprend la vie normale… Qu’est ce que ça me plairait que ça se passe ainsi… Mais…

Douleurs qui s’amplifient au fur et à mesure que le temps passe, sensation de gonflement sous le bras, prise de poids avec pieds, mollets et mains gonflés… Qu’en est-il du manuel du parfait petit cancéreux ? Je regarde le sommaire, je feuillette chaque page, mais… une fois sortit du circuit, que devenons nous ? Bon, on m’avait dit : « à surveiller ». Pour moi ça veut dire : « en cas de soucis, on assure l’échange sans discuter ! ». Alors j’envoie ma chère amie Valoche qui est encore en traitement, demander pour moi un rdv. Ainsi, je ne les embête pas au téléphone. Mais voilà que la secrétaire se transforme en videur de boîte, vous savez ce cerbère qui à l’entrée dit « tu passes… tu passes… tu passes pas… ». Autant dire que je ne suis pas passée. Retour à la case médecin traitant. Moi, je n’ai rien contre, mais… je ne l’ai pas vu depuis des mois, il ne m’a pas du tout suivi dans mes traitements, depuis qu’il m’a envoyé faire ma mammo… Et ça me paraissait logique de finir là où j’ai été prise en charge… Râpé.

Mon PAC, que je devais pouvoir enlever, on fait quoi, quand, comment ? Ah ben finalement il va falloir attendre un rendez vous de contrôle… et ça reporte de quelques… semaines… Vous me direz que je ne suis plus à ça prêt, mais savez vous l’impact psychologique, de porter un PAC sur soi en permanence ? Sans compter qu’on ne peut pas porter avec le bras gauche (ni le droit puisqu’on a été opéré et irradié… et je n’en ai que deux, moi…). Et que parfois, il me fait mal… J’attendrais donc.

Et pour la rééducation, la suite logique de l’affaire… Si on nous encourage fortement à y avoir recours, j’estime pour ma part que c’est juste indispensable. Soit. Avant de pouvoir faire du sport, il nous faut faire un électrocardiogramme, une épreuve d’effort, puisque la chimio est en elle-même toxique pour le cœur, et donc, c’est une mesure de prudence. Vous voyez, moi j’ai pas mal couru avant ma maladie. Depuis, j’ai même du mal à marcher sans être essoufflée, et même à monter les escaliers parfois. Ce n’est donc pas pour rien qu’on nous impose ces préalables. Et c’est plutôt rassurant même ! Sauf que… Valérie doit attendre mi-mars pour avoir son rdv chez le cardiologue. Car une fois hors du circuit, nous ne sommes plus prioritaires pour les examens. Ok. C’est comme ça, on perd un peu de temps, mais c’est comme ça. Sauf que lorsqu’elle a osé exprimer son interrogation, sur ce qu’elle allait bien pouvoir faire en attendant ce rendez-vous, qui allait en lui-même l’autoriser ou non à faire à nouveau du sport, on lui a répondu qu’elle n’avait qu’à commencer par elle-même… Donc… on protège le sport réalisé sous contrôle, mais pour le reste… ? Est-ce qu’on ne risque rien tant qu’on fait ça loin de l’hôpital ? Ou est-ce que ça devient notre problème s’il nous arrive quelque chose ? Ca me semble tellement léger, tellement… vide de sens… Vide tout court en fait. Je me dis que c’est parce qu’il n’y a rien de prévu pour combler ce vide là, qu’on se sent mal à l’aise face à la situation.

Un jour, on m’a dit que souvent les patients, une fois les traitements terminés, se sentaient seuls, partaient en dépression, parce qu’ils ne venaient plus régulièrement dans le cocon qu’on avait créé autour d’eux durant la prise en charge. Aujourd’hui, je me rends compte que si je gère très bien le fait d’en avoir fini avec la chimio et les rayons, si psychologiquement je suis stable, j’aurais encore besoin d’un service après-vente. Et que celui-ci n’existe pas. Oui, j’ai rendez-vous dans 3 mois avec ma radiothérapeute. Oui je dois revoir mon chirurgien dans 2 mois. Oui, mon oncologue mettra en place un suivi quand on se reverra, mais il se sera passé 3 mois sans que ça ne soit le cas. Mais pour le reste…

Pour eux, c’est le quotidien, de prendre en charge des malades du cancer. C’est normal, ce qu’on traverse, il n’y a plus grand-chose d’extraordinaire. Mais pour nous… c’est une expérience compliquée, des nouvelles sensations régulièrement, des petits soucis qui nous effraient, parfois. Des questions qu’on a oublié de poser sur le moment, mais qui un jour surviennent, et qu’on a besoin d’exposer. Et là… personne. A part le cerbère de la porte d’entrée. Rigide et droit. A reçu des ordres. Obéit. Renvoie vers le médecin traitant. Qui est parfois aussi démuni que nous… Parce que chacun son métier, quoi. Et Dieu sait comme j’aime mon gentil docteur. Et comme je respecte son professionnalisme. Il manque quelque chose, à cet endroit précis.

Qu’on ne se méprenne pas, je n’ai rien contre les secrétaires, car elles font leur travail. C’est le système, à qui il manque une étape. Et je n’en veux à personne, parce que j’ai vraiment été très bien soignée. Et chaque personne rencontrée durant mon parcours a été d’une grande humanité à mon égard. A part peut être madame « prenez du doliprane »… et encore, elle a eu le mérite de me faire rire sur le long terme. C’est bien aussi, non ? Mais peut être qu’il serait important de penser à ce trou qui est à combler, juste là où je me trouve actuellement. Parce que je sais, que je ne suis pas la seule dans ce cas.

Ceci dit, il y a une fée qui elle, est fidèle à elle-même. Disponibilité permanente, douceur et gentillesse sans faille. Ma fée moi-du-bien est et restera à jamais pour moi le trait d’union entre chaque étape, entre chaque professionnel rencontré, ma parenthèse de bonheur au milieu de la douleur, et un sourire que jamais, jamais, je ne pourrais oublier.

Voir les commentaires

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
commentaires
A
Bon je rattrape mon retard (ce post là était passé sous mon radar) et que vois-je... Je suis désolée que tu ais du passer par là. Je ne sais pas si c'est la réalité ou pas mais je te sens plus démunie à travers ce post qu'à travers un post de chimio. Et je me sens vraiment désolée. Toute proportion gardée (ça n'a RIEN à voir je le sais bien) mais ça me rappelle les naissances : pendant quasi 9 mois tu vois plein de médecin, on surveille tout ce que tu manges (ou autre) et puis du jour au lendemain ton corps cesse d'intéresser le monde. <br /> Pourtant parfois tu as tout autant mal, tu es tout autant coincée/dépendante/pleine de question. On te dis "rdv dans 3 mois" et en attendant ? Si ça ne va pas ? Dans cette situation là j'ai du me battre, être renvoyée de médecin en médecin etc... et autant ça peut se faire quand tout ça est du à un joli petit bébé qu'on aime d'amour, autant quand c'est après un cancer on ne devrait pas. Comme d'apprendre à nager en étant balancée dans le grand bain.
Répondre
T
Je reconnais bien la l'entr'aide des roses. Merci.<br /> Oui il y a la ligue. J'avoue que je n'y suis jamais allee. En fait je crois que C est rassurant d'avoir toujours les mêmes contacts et la c'est pas tout à fait possible. Ceci dit ca va de mieux en mieux et j'ai de moins en moins besoin de me rassuree auprès d'eux. Et la semaine prochaine je démarre le programme de rééducation.
Répondre
C
Bonsoir Estelle, non vous n'êtes pas seule ! D'abord, moi je vous lis ! Je suis dans le même cas que vous, dans quelques jours, je passe sous "surveillance"... Mais je sais que mes toubibs sont toujours là. Est-ce un hôpital d'exception ? Je ne sais pas, mais si j'ai la moindre question, je sais que je peux téléphoner et j'aurais quelqu'un qui répondra à mes interrogations. Il y a aussi cette fabuleuse asso que l'on appelle "la ligue". On peut les contacter aussi et leur poser des questions. Puis, il y a sans doute une équipe de psy dans l'hôpital où vous avez eu vos soins. Ils sont là pour vous écouter et vous aider à cheminer...<br /> Sinon, je peux être aussi une oreille attentive à l'occasion ;)<br /> à bientôt de vous lire.<br /> Carole
Répondre

Girl Gift Template by Ipietoon - Hébergé par Overblog