Chroniques d'une tortue au foyer

Chers lecteurs, chères lectrices

Etre en longue maladie, ça revient parfois à vivre de la même manière qu’une mère au foyer. La maladie en plus. Mais si parfois cette dernière m’oblige à dormir plus que d’habitude, à prendre soin de moi d’une façon un peu plus sérieuse que la maman que je serais sans cela, il y a des jours, où ma vie est juste normale. J’ai déjà évoqué ces instants chéris de la normalité qui permettent de tenir le cap dans les traitements, mais aujourd’hui, j’ai décidé de vous raconter une journée type, qui fait que je suis juste heureuse de vivre, et que je me sens vraiment, mais alors vraiment, normale.

6h15, le réveil sonne. Il n’est pas pour moi, mais pour Mika qui se lève en premier. Moi, je suis contente car il me reste 3 merveilleux quarts d’heure de sommeil. Mais en me retournant, je sens derrière moi le petit corps de Faustine qui est encore venue nous rejoindre au milieu de la nuit. Et son petit bras qui vient enlacer mon cou. Ma nuit est finie, mais je sourie dans la pénombre, de cet instant béni de tendresse et de douceur. Mon enfant, ma petite, qui vient se blottir contre sa maman… J’en profite parce que je sais que ça ne durera pas éternellement. Je savoure. Pendant 3 quarts d’heure.

7h, le réveil re-sonne. Cette fois ci c’est pour moi, et je me lève, ma petite dernière sur les talons. Elle est à peine réveillée qu’elle a mille choses à me raconter. Nous allons ensemble réveiller Elise, que nous trouvons déjà prête dans sa chambre, habillée, coiffée, lavée, et prête à descendre déjeuner. Et Chloé, la marmotte, complètement emmitouflée dans sa couette, qui resterait probablement encore un peu au lit, si on lui en laissait l’occasion.

Michaël a tout préparé en bas, et quand les filles descendent, sur la table les attend leur bol de chocolat, le verre de jus de fruit, et la tartine qui leur correspond : pain de mie confiture pour Chloé, pain de mie sans croûte et pâte à tartiner au chocolat de la marque bien connue, pour les deux autres. Papa les connaît si bien qu’il n’a pas besoin de leur demander ce qu’elles veulent. Et s’il leur sert plutôt des céréales, il saura qui prendra lesquelles, et qui avec ou sans lait, chaud ou froid… Moi pendant ce temps, je me douche et je me prépare.

Lorsque je descends à mon tour mon mari est partit travailler. Et les filles bavardent en prenant un peu trop leur temps. Il est l’heure de les bousculer un peu, parce qu’à ce train là, elles finiront en retard à l’école. Alors hop, on termine, on prépare la collation pour l’école, brossage de dents, et c’est le moment de s’en aller. Quand il fait beau, et nous avons la chance que ça soit le cas depuis la rentrée, on part toutes à pieds. Faustine en écharpe de portage sur le dos, et les grandes gambadant autour de moi, parfois avec les petites voisines qui sont à l’école avec elles. Moi je dépose mes grandes et je continue vers la maternelle. Faustine m’interroge tantôt sur les panneaux de signalisation et leur signification, tantôt sur le pourquoi des feuilles qui tombent des arbres, et le chemin passe vite. A l’école, elle met ses chaussons seule, et accroche son sac et sa veste au clou. Un bisou, une accolade, encore un bisou, et elle s’en va fièrement rejoindre les autres enfants qui commencent eux aussi leur journée. Et je repars seule, à pieds. J’aurais ainsi effectué 2,5km de bon pas, ce qui est un bon début dans ma journée. Ca me met en forme et… ça me donne faim !

8h30. Il est temps de déjeuner à mon tour. Je prends ce temps pour regarder un épisode d’une série télé, mon moment à moi dans la journée. Et ensuite, selon le jour, j’irais parfois à la messe à 9h, ou bien je m’attaquerais à un projet dans la maison, comme faire mon ménage, du rangement dans une armoire, de la lessive ou que sais-je. Une journée normale. Parfois, comme hier, je suis vraiment très fatiguée alors je décide de ne pas trop en faire, parce que je sais que désormais je dois garder des forces pour la suite. Alors je me fais les ongles, je fais la sieste, je lis, ou je retourne m’allonger un moment.

A 11h30, les filles sortent de l’école, et il faut que le repas soit prêt. Parce que le temps de midi passe vraiment vite. J’essaye d’équilibrer leurs repas, mais parfois, ça m’arrive d’être une vraie faignasse… La semaine passée, les grandes sont arrivées à la maison, je ne savais pas quoi cuisiner. Faustine mangeait à la cantine, alors je leur ai proposé d’aller au mac do. Elles ont sauté de joie, moi j’adore le mac do aussi, alors on s’est fait plaisir… et pour la prochaine fois que je serais en mode grève de la cuisine, elles m’ont commandé d’aller manger au buffet chinois. Elles se laissent pas démonter, au moins !

13h… l’heure tourne à toute allure et il est déjà temps de retourner à l’école.

Depuis quelques temps avec ma maman on essaye d’aller marcher pour se faire du bien. Donc là, c’est une heure où ça nous arrange bien, elle parce qu’ensuite elle va pouvoir retourner travailler, moi parce j’aurais peut être si besoin la possibilité de me reposer avant la sortie des classes, et les activités qui s’en suivent. Parce qu’à 15h15, c’est la course qui commence. Le lundi, Elise a danse. Le mardi, elles font du patronage, et Elise va commencer là bas la préparation à la première communion. Le mercredi, c’est flute solfège et chorale pour Elise, et solfège et poney pour Chloé. Le jeudi, cor pour Chloé, et le vendredi, danse à nouveau pour Elise. Ajoutons à ça les devoirs pour les deux grandes, le fait qu’Elise soit en bilingue, je peux vous dire que je ne m’ennuie pas… Et Mika est mis à contribution, parce que hier, par exemple, je devais en prime assister à la réunion de rentrée de Chloé, et ce soir c’est au tour d’Elise. La question que je me pose c’est : comment je faisais quand je travaillais ??? Et donc comment je vais faire quand je vais re-travailler ?

18h. Le soir, tout s’emballe. Douche, repas, brossage de dents, histoire du soir, bisous et câlins, et enfin dodo. Extinction des feux à 19h30, max 19h45. Un petit coup de rangement, et la soirée des adultes peut commencer. C’est un moment important, où nous nous retrouvons, un peu au calme, pour parler de nos journées, organiser la suite de la semaine, échanger des anecdotes. Je suis heureuse d’avoir ce temps avec mon mari. Il nous permet de rester sur la même longueur d’onde, et moi, je recharge mes batteries de courage avec lui. Un petit film, en ce moment accompagné d’une glace mais il ne faut pas le dire, c’est notre petit secret, et la journée s’achève sur le même sourire béat qu’elle a commencée. Ca, c’est la journée que j’affectionne.

Comme nous ne vivons pas dans le monde des bisounours, même si on pourrait le croire en me lisant, nous avons notre lot de soucis quotidiens. En ce moment, le principal s’appelle crabe. Il a donné un nouveau rythme à notre vie par la force des choses, mais ne nous empêche pas d’être heureux ni de faire des projets.

J’aime ma vie.

Si l’existence d’une tortue au foyer vous fait envie, je peux vous confier deux ou trois petits secrets. Il n’y a pas de formation diplômante ni de normes très exigeantes pour y prétendre. Les valeurs transmises par nos parents, et avant ça nos grands parents, en sont les bases. Les mots d’ordre étant amour, respect, amour, ouverture d’esprit, amour, bienveillance, et bien sûr… amour !
Si un jour on me demandait ce qu’il me faudrait pour affirmer que j’ai « réussi ma vie », je crois que je dirais sans hésiter, que ces valeurs qui nous ont été enseignées, sur lesquelles nous avons construit notre couple, puissent être les fondations de la vie de nos enfants, leur apportant autant de bonheur dans leur futur que ce que cela m’apporte, aujourd’hui. Là, je saurais que j’ai réussi ma vie.

Ainsi s’achève donc la journée type d’une tortue au foyer. Qui, avant d’aller à son tour prendre du repos bien mérité, va encore aller embrasser et border sa petite troupe, plongée dans un sommeil je l’espère réparateur, et peuplé de rêves magnifiques. Elles le méritent. Car pour elle aussi, et je vous en demande pardon mes chéries, la vie est un peu chamboulée en ce moment. Mais l’amour, croyez moi… l’amour vaincra !

Comments

[soda]

Jolie déclaration d'amour. Par contre j'ai eu l'occasion pendant 2 mois de faire une pause et de passer plus de temps avec ma famille. Ici çà m'a permis de me ressourcer, de consolider les liens et c'est une chance dans le rythme de fou de notre génération. Alors tu as raison d'en profiter à fond de ses moments, de cette petite dose de bonheur en plus. Cette force qui te donne la force de surmonter les grenadines et le crabe. Bisous