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Chers lecteurs, chères lectrices
Ce que je m’apprête à vous révéler, j’aurais préféré ne jamais avoir à l’écrire. Mais trop, c’est trop. Et si j’en ai honte d’avance, je pense à tous ceux à qui mon témoignage pourra servir par la suite. Alors je mets mon amour propre blessé, que dis-je, dézingué, dans un placard, et je lâche le morceau. Un sacré morceau. Il y a peu, j’ai tiré le portrait de ma fée, parce que je trouvais ça normal de lui rendre hommage. Là, je vais vous présenter quelqu’un à qui j’ai plutôt envie de refaire le portrait que de le tirer. Et pour qui je n’éprouve aucune sympathie. Cruella d’enfer, la cruelle traitresse, j’ai nommé mon pèse personne. Ma balance quoi.
Quand on m’a diagnostiqué mon cancer, je venais de perdre une dizaine de kilos, il m’en restait encore un ou deux à dégommer pour être pleinement satisfaite, mais je ne suis pas allée au bout. Parce que d’un coup, je me suis imaginée affaiblie par la maladie, les traitements, et que de fait, j’ai stoppé net mon régime, afin de garder des réserves pour le combat. Le premier rdv avec l’oncologue m’avait surpris, puisqu’elle m’avait mise en garde contre l’inverse de ce que j’imaginais, à savoir la prise de poids ! Ca ne me plaisait pas, comme idée, mais quand même, ça m’inquiétait moins que de devenir squelettique.
J’ai donc commencé mes traitements à 62kg pour 1.57m. C’était le 15 juillet 2015.
Lors de la première chimio, j’ai eu des nausées qui m’ont empêché de manger les 3 premiers jours. Et j’ai perdu 2kg. Ensuite, j’ai pris soin de ne pas grignoter entre les repas, de me satisfaire de rations normales, et sans me priver de rien, mon poids est resté stable à 60kg.
Les cures 2 et 3, j’ai aussi eu des nausées mais j’ai tout de même réussi à manger à tous les repas. J’ai maintenu mon poids stable sans soucis. Trop forte, je défie la loi de la chimio qui fait grossir !
Et puis est venu le taxotère. Cette nouvelle partie de traitement qui nécessitait une prémédication aux corticoïdes. J’avais peur que ça m’affame, mais au lieu de ça, j’ai perdu le goût. Dans ce cas là, aucun intérêt de manger pour le plaisir, car tout ce que je mettais en bouche s’apparentait à du carton. En prime la douleur me coupait l’appétit. Par exemple, lorsque j’étais hospitalisée, je ne mangeais guère que ma soupe et un bout de pain à chaque repas. J’ étais donc super confiante pour la suite. Mais quand le jour de la sortie on m’a demandé de monter sur la balance, ma belle confiance en moi s’est envolée, car….. malgré tout ça, j’ai pris 2kg dans les dents. Ou plus certainement, dans les fesses…
Et puis j’ai retrouvé le goût. Malédiction… car il a bien fallu que j’essaye toute sorte d’aliments pour voir si tout avait repris sa place normale !!! Il y a même des trucs que j’ai été obligée de goûter plusieurs fois, pour être sûre : les torches aux marrons, le nutella sur du pain, le nutella sur des crèpes, le nutella à la cuillère (et vous avez vu, ne n’ai pas précisé quelle taille, la cuillère…). Catastrophe. Tout était bon.
J’ai changé de protocole, et là, encore plus de cortisone. L’avantage, c’est qu’il y a moins d’effets secondaires à la chimio. Le désavantage, et pas des moindre, c’est que je n’ai pas reperdu le goût. Et en prime, j’ai tout le temps faim. J’ai d’abord essayé de me convaincre que c’était parce que je m’ennuyais que je mangeais. Mais comme je ne m’ennuie jamais, je n’ai pas réussi à me croire. Et puis j’ai tenté de me limiter… Mais les portions que j’avais estimées comme étant raisonnables jusqu’ici, et qui me convenaient très bien, me laissaient sortir de table non repue, et surtout, si je ne mangeais pas entre les repas, je me trouvais mal… Alors j’ai augmenté les rations. Et le nombre de goûters dans la journée. Et j’ai réintroduit le chocolat devant la télé, qui avait été banni depuis un certain temps… Et me voilà, avec une prise de poids dont je ne vous donnerais pas le chiffre, mais qui me désole et me désespère. Bon, on est d’accord, je ne suis pas à + 10 non plus, mais tout de même, je me suis fait peur. J’ai donc décidé de me prendre en main.
La semaine dernière, j’ai commencé un pseudo régime samedi matin… Je l’ai arrêté à 16h, avec le goûter, et le soir parce que nous sommes allés au resto. Mais j’ai repris le lundi. Avec un petit déjeuner énergétique composé de banane écrasée avec du jus de citron, et des céréales muesli que j’ai soigneusement pesés. A midi, j’ai été obligée de finir le gâteau au fromage blanc de la veille à midi… et au goûter il a fallu que j’emmène Elise au café Mozart boire un chocolat viennois plein de magnifique crème fouettée… Bon, ben je recommencerais demain.
Ca me fait penser à cette chanson. Vous savez elle fait comme ça : lundi matin, l’empereur, sa femme et le p’tit prince sont venus chez moi pour me serrer la pince, mais comme j’étais partit, le p’tit prince à dit : puisque c’est ainsi nous reviendrons mardi. Et ça continue avec tous les jours de la semaine. Il ne m’a jamais rencontré en fin de compte. Mon régime, ça a été pareil toute la semaine. Chaque matin j’étais pleine de bonnes résolutions, et chaque soir je me disais : tant pis je reviendrais demain…
Mon entourage est trop sympa. Tout le monde me dit que je les reperdrais, mes kilos, quand j’aurais fini la chimio… Mais pour ça, il va falloir que je reprenne de bonnes habitudes alimentaires… Au lieu de ça, en ce moment je me suis remise à cuisiner… et comme j’adore cuisiner et manger… je reviendrais une autre fois !
Donc pour en revenir à Cruella… cette traitresse est la première personne que je vois le matin, et elle est en ce moment très désagréable avec moi. De fait, le premier mot que je prononce en me levant, est souvent « connasse »… Ben oui… Mais au final, je ne suis pas certaine que ça s’adresse seulement à elle… Cruella, elle est pas sympa, parce que dans les montées, elle s’emballe, mais elle freine vachement dans les descentes. C’est contraire à toutes les lois que je connais, ça, vous nêtes pas d’accord ? En plus elle a des répliques toutes faites, probablement inspirées par mon frère, du style « une seule personne à la fois svp »… Vous trouvez ça normal, de vous faire traiter ainsi à peine sortit du lit ???
Pour la faire taire, je n’ai donc que 2 solutions. Ou je retire les piles, ou je commence à me détendre de la fourchette. Et vous savez quoi ? Bonne nouvelle !!! Ce matin j’ai recommencé à faire très attention !!!
J’aurais voulu vous parler comme souvent de ma copine Valérie. Mais je l’ai eue ce matin au téléphone, et refuse d’apparaître dans cet article. Pensez donc ce que vous voudrez !!!
Voilà. Il est temps pour moi de vous laisser car il va être 16h. En plus, demain on a promis de préparer des bonnes choses pour la chimiapéro, et je ne m’y suis pas mise encore. D’ailleurs, je ne sais pas non plus encore ce que je vais bien pouvoir faire à manger ce soir…
A bientôt donc ! Vous voyez, je ne m’ennuie pas… je ne devrais donc pas avoir sans arrêt envie de grignoter !!!
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